La tour Davance
Au pied de la tour séculaire Qui veille sur les sapins Et les cerfs d'alentours Le platane dans le sol Puise son histoire Et nous transmet dans son tronc et ses feuilles Les passages d'hôtes illustres Qui ont marqué de leur présence Ce lieu Henri IV, lui même, dit-on S'y serait reposé Et aujourd'hui nous Sommes les hôtes investis de ces lieux Célébrant la vie À travers une union Dont les landes agenaises Se souviendront encore longtemps Musique d'un autre temps Langue perdue et retrouvée Le temps de quelques chansons Les cerfs brament Leurs chants dans la nuit noire Qu'aucune lueur ne vient troubler La tour Davance stoïque Nous abrite Le temps D'un passage suspendu Aux sapins d'alentour La brume et la bruine du matin Nous rappellent Qu'autrefois on marchait Sur des échasses Dans ces marais asséchés Les fades peuvent dormir tranquille Au pied de la tour Davance L’orage
Arrivé soudain Tonnerre Éclairs Bourrasques et vents Violence et déchainement Les volets claquent Symphonie pour volets Et portes ouvertes Qu’on s’affaire à fermer Pour les rouvrir de nouveau Aussi soudain Le soleil perce les nuages Et réapparaît Resplendissant Plaisir des tropiques L'intrus Il s'installe dans sa vie À ma place Une place que j'ai abandonné Pour une autre Mais que le temps N'a pu combler Une place où nos ébats Ont un goût d'éternité Un goût d'inachevé Peut-on changer le passé Réinventer une route Une nouvelle vie Le vide s'est comblé La nature l'a en horreur Un autre est venu Prendre la place Laissée par d'autres Je suis jaloux De ceux qui ont rempli l'espace Où je n'étais pas Comment vouloir aux autres De le remplir De remplacer mes souvenirs Par d'autres où je ne serai pas Lundi Il est Lundi je crois J'ai un rendez vous J'ouvre le calendrier De mon portable À la date d'aujourd'hui Il m'indique vendredi Impossible, on est lundi Je regarde l'ordinateur Même chose Dans ma tête on est lundi Il est toujours lundi Quand le temps ne compte pas Le temps qui passe La vie nous échappe Et on n'y peut rien Le temps passe et fuit Inlassablement La vie se passe Malgré nous Sans nous Apprécier la vie même J'aime les levers du jour Qui veulent dire Que je suis en vie J'aime ces moments où Tout renaît de nouveau Un nouveau soleil Un nouveau ciel Une nouvelle vie De nouveaux amours Semblables à hier En même temps Différents d'aujourd'hui Un nouveau jour se lève Merci à la vie Notre vie
Nous avons tous une autre vie Celle qu’on a Celle qu’on voudrait avoir Celle dont on rêve Celle qui n’existe pas L’errance
Je suis de la mouvance Fils de la lune Et de la mer Je suis issu de l’errance En des temps de transhumances Inhumaines Ces temps où l’humanité De certains Était questionnée Les ramenant au rang de bête Je suis fils du soleil Et de la terre J’ai mes racines aux Antilles Et mes branches tentaculaires S’étirent au Nord de l’Amérique En Europe, en Afrique Je suis de l’errance Vagabond aux pieds nus Gitan d’avant le temps Le monde est ma patrie Le Cap
La citadelle veille au loin Perchée tout la haut Se laissant admirer Par temps clair Les bateaux et les pirogues Sont sortis tôt le matin Ils sont six Sillonnant Un petit bout de mer Espoir d’un butin Miraculeux À vendre au marché Du jour À même la plage du retour Le soleil se lève Levant le voile De brume Tout doucement d’abord Pour ne pas froisser La mer Puis En un rien de temps Enflamme le ciel D’un brasier Accoudé au balcon Une autre belle journée S’annonce Quelques filaments De nuages ponctuent Un ciel bleu azur À l’infini Une autre journée Au paradis Le marché
Ses odeurs Ses humeurs Vendeuses vendant De milliers De petites choses À toutes fins pareilles Explosion de sensations On bouscule On tire Achetez-moi ci Achetez-moi ça Meilleur prix pour vous La voix s’étire Et se perd Jusqu’au prochain étal Qui prend le relai Aussitôt remplacée Par une autre Mélopée infinie La viande, voisine Avec l’essence Vendue en petites bouteilles Et l’huile de même D’olive, qu’elle était naguère Est devenue végétale Maïs, colza, canola Toutes importées Sacs de riz de partout Made in USA Hecho en Dominican Republica Aucune variété locale en vue L’aide aux fermiers d’Arkansas Est venue à bout des fermiers d’ici Même proche de l’Artibonite Le riz local n’a point de cours Le marché foisonne On passe aux volailles Puis aux chèvres Suivi des porcs Qui s’annoncent déjà Par leurs odeurs Succédés par les légumes Plaisir aux yeux de l’artiste Foisonnement de couleurs Difficiles à résister Remplacés par les fruits Odorants et appétissants Il faut le vivre Pour le comprendre Espoir
Dis marin Dis pêcheur Que vois-tu là bas Au loin Au delà de l’eau Moi, j’ai beau scruté Je ne vois rien Puis-je monter Sur tes épaules Pour mieux voir Pas de chances Je ne vois que de l’eau Dis marin Dis pêcheur Toi qui connais la mer Ton épouse, ton amante Existe t-il vraiment Une terre, là-bas au loin Comme on le prétend Fertile et plein d’avenir Ou est-ce mon imagination Dis marin Dis pêcheur Toi qui sillonne la mer Pourrait-elle me donner Une Simbi* pour m’emmener Par-dessus les eaux Simbi nan dlo Belle déesse Redoutée et aimée Je suivrai ton chant Jusqu’au délire Jusqu’au bout du monde Pour poursuivre ce rêve Emmène-moi avec toi Au bout de la mer Sur tes nageoires dorées Pour découvrir Cette terre lointaine Et si souvent rêvée * Simbi : sirène dans la mythologie haïtienne et vaudou. Va Avance, Vers où le vent te pousse Le pas alerte et le cœur léger Ceux que tu laisses Tu les retrouveras au retour Avance, Suis la route pas toujours tracée Au risque de te tromper Et arriver ailleurs Mais cet ailleurs Réserve de belles découvertes Et, comment se tromper Quand on dicte sa route Avance, Où ailleurs devient ici Et ici un autre ailleurs Tout simplement Avance, Tête haute Cheveux au vent Vers l’horizon Et changer d’horizon Quand l’horizon arrive Sur la route et dans le doute Du chemin pas toujours tracé Destin fatal Le sang qui s'étend sur le sable Est celui d'un jeune de douze ans Pris dans un croisé de tirs Entre des bandes rivales Qui se battent et se tuent Pour trois fois moins que rien Mais quand on n'a rien du tout Quelques fois presque rien Vaut mieux que rien du tout Même s'il faut pour l'avoir Le prendre à un autre Qui n'a guère plus à donner Même s'il faut pour le faire Tuer des enfants Le sang qui se lave sur le sable À chaque lampée d`écume C`est ton fils C`est mon frère Et pourtant Il ne fera pas la une Dans les journaux de nulle part C`est un cas si banal Un mort parmi tant d`autres Quand on meurt au quotidien Pour des riens Et qu'on est moins que rien La police n'a que faire Le gouvernement n'a que dire Et la presse reste muette Celui que l'on assassine, C'est mon enfant, mon futur, mon frère Il n'avait pas d`avenir Et était né pour mourir Qu'il meure maintenant ou plus tard Qu'importe Il faudrait qu'ils en meurent plus Pour que le monde s'éveille Ce sang qui s'efface À chaque lampée de vague Fera vite oublier Cet enfant qui est mort Sans même savoir pourquoi Sinon pour que des gens Qui n'ont presque rien Puisse avoir un peu plus de rien Car pour des gens qui n'ont rien Avoir un peu plus de rien Vaut mieux que rien du tout Observations Comment absorber Tant de stimulations En si peu de temps Vivre tous les sens en éveil Des odeurs du marché Aux odeurs de la route De la luminosité du ciel A la poussière du chemin Qui me prennent les narines Le soleil sur ma peau Brûlant comme du feu Et le vent fouettant le visage Incroyable parcours Une si petite distance En tant d’heures Ballotter par les cahots de la route Regarder cette beauté Défiler sous mes yeux Nature enivrante Luxuriante Tantôt verdoyante Et tantôt dégarnie Je ne vois plus Les contrastes Je ne vois plus Que la beauté Des êtres Voyages Assoiffés de contrées lointaines Ivres de leur voyage Fatigués de naviguer Sur des mers incertaines Capitaines et matelots Songeaient au jour lointain Où enfin la terre inconnue Se montrera Ils sont venus porteurs de misère Volontaires désignés Libérés de leur prison Pour partir conquérir des terres Contre leur gré De bagnards qu’ils étaient Ils ont poursuivi leur cruauté Dans toutes les terres Où ils ont posé l’ancre L’or et les terres promises Valant mieux que la vie Des autochtones rencontrés |